Lorsqu’il n’était pas sur Agora ou sur le Thésée, le commandant Bertinelli passait son temps libre sur Terre, dans l’une des résidences familiales en Europe. La famille Bertinelli possédait de nombreux officiers prestigieux et notables de l’Alliance, les parents d’Antoine eux-mêmes officiers à la retraite, aujourd’hui magistrats. Claudia, petite sœur d’Antoine était médecin au sein d’Argos. Également en repos, tous les deux en ont profité pour se voir dans leur résidence romaine. Antoine avait également un jeune frère, Marc, qui ne faisait lui pas partie d’ARGOS mais était écrivain et fréquemment en voyages ; ce qui était actuellement le cas. A cause de leur grande différence d’âge, Antoine et Claudia n’avaient pas grandis ensembles mais avaient appris à s’apprécier par la suite.

La résidence romaine des Bertinelli était récente, mais construite à la manière d’une villa de l’Empire romain. Le charme de l’ancien combiné au confort de la modernité, comme beaucoup de choses de l’Alliance Agora.

Alors qu’Antoine et Claudia discutaient, installés dans le jardin, un coursier sonna à la porte. Il devait remettre un colis au commandant Bertinelli.

— Qu’est-ce que c’est ? Demanda Claudia sirotant un verre de thé glacé.

— Aucune idée, ça doit être pour le boulot.

Antoine ouvrit soigneusement le colis, il n’était pas bien épais, contenant une pochette de documents ainsi qu’une lettre explicative.

« Commandant Bertinelli, vous êtes certainement l’un des officiers les plus méritants d’ARGOS. Vos compétences ne sont plus à prouver, vous avez participé à sauver notre culture face aux invasions Sauvages. Malheureusement, une autre guerre se profile et elle ne pourra se faire de manière conventionnelle. Joint à cette lettre, vous pourrez trouver une série de documents prouvant que les plus hautes sphères de l’alliance ont été infiltrées par une race autochtone malveillante. Je sais que tout cela est difficile à croire, mais tout cela est bien réel. Cette race peut prendre le contrôle des hommes, et assimiler une partie de leurs compétences et souvenirs. Face à eux, vous possédez néanmoins un avantage. La cérémonie de la Purification auquel vous avez participé sur Égée vous rend invulnérable à leur prises de contrôle. Prenez connaissance des informations présentes dans ces documents et choisissez soigneusement votre entourage, le danger peut être partout. J’imagine facilement que vous auriez des questions à me poser, le moment de notre rencontre n’est pas encore venu, mais je saurais comment vous recontacter. L’avenir de l’Alliance et tout ce qu’elle représente dépend de vous. »

Le commandant commença à consulter rapidement le reste des documents. Il s’agissait de relevés sanguins, analyses ADN et photographies filtrées. Elles mettaient en évidence la présence de brumes rougeâtres autour de grandes figures de l’Alliance, dont l’Amiral Solas, en charge des vaisseaux d’explorations comme le Thésée. Bertinelli ne comprenait pas tout ce qu’il avait sous les yeux, les données scientifiques dépassaient ses compétences. Sa sœur Claudia parviendrait sans doute à lui expliquer mais il ne voulait pas la mêler à une affaire potentiellement aussi dangereuse.

— Je dois passer un appel, c’est par rapport à notre dernière mission. J’en ai pour quelques minutes.

Le commandant se rendit rapidement dans la pièce consacrée aux médias, elle possédait une borne Charon permettant de se connecter au Styx, un environnement virtuel facilitant les communications à distances spatiales. Bertinelli s’installa sur le fauteuil et se retrouva plongé dans la simulation d’une cité grecque. Il s’installa à une table de la place centrale et attendit quelques minutes le temps que ses invités arrivent. Carl, Amanda et Andersen ne tardèrent pas. Bertinelli expliqua alors la situation. Il scanna également certains documents afin que Sigurdsonn puisse les expertiser.

— Bon sang, oui tout cela me paraît correct. C’est terrifiant, conclut Carl.

— Merde, tu es sûr que tout est fiable ? Demanda Amanda.

— Oui, je reconnais certains de ces travaux. C’est une théorie assez populaire le fait qu’une quatrième race intelligente puisse exister dans le Secteur, mais personne n’avait réussi à le prouver. Et personne ne pensait qu’elle pourrait chercher à nous nuire. Il y a quelque chose de particulièrement intéressant ici, un artefact pourrait permettre de les détecter facilement, même à l’intérieur d’un hôte. Celui qui a composé ce dossier de preuves semblait vouloir étudier ceci.

Carl pointa un coffret noir présent sur une liste d’inventaires des artefacts de la Bibliothèque d’Agora. Ce même coffret avait été évoqué dans l’actualité lorsqu’il y a un peu plus de deux ans un archonte avait pactisé avec un groupe criminel afin de s’en emparer. Le procès de l’archonte avait été très fortement médiatisé, en particulier de par la violence de sa défense.

— Hé, mais je le connais ce coffret. J’avais servi d’intermédiaire entre les enquêteurs et ARGOS afin qu’il retrouve sa place.

— Vous avez gardé contact avec ces enquêteurs ? Ils pourraient être utiles, suggéra Bertinelli.

— Pas de problème, l’un d’eux est un ami. Je suis justement actuellement sur Élysée, j’irais lui rendre visite, proposa Amanda.

— Ne lui donnez pas tous les détails, mais il pourrait en apprendre plus sur ce coffret ou la personne qui a composé ce dossier.

Le Capitaine Andersen était pensif, plongé dans les informations du dossier. Il observa de plus prêt l’une des feuilles.

— On dirait des coordonnées de planètes. Par contre ce qui est écrit à côté, je n’arrive pas à déchiffrer.

— Mon IVA non plus, sans doute une langue ancienne. L’auteur a voulu protéger ces informations-là.

— Il y a le même genre de notes sur d’autres pages, releva le commandant.

Bertinelli soupira longuement. 

— Je sais à qui faire appel pour nous aider. Ça ne va pas être facile, mais je suis sûr qu’elle comprendra la gravité de la situation.

Les choses étaient donc établies. Le Capitaine Andersen allait organiser une mission en direction des planètes ciblées par les coordonnées du dossier, Amanda allait confier à son ami détective la mission de se renseigner sur le créateur des documents. Pendant ce temps, Carl tenterait de mettre la main sur la mystérieuse mallette tandis que le commandant Bertinelli allait revoir une figure de son passé, son ancienne compagne Agata.